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    Édito de la 17ème édition du Carrefour du cinéma d'animation

    Dans les années 2010, le cinéma d’animation est entré dans une nouvelle ère. En France, à tout le moins, pour ce qui concerne le cinéma d’auteur. Cette nouvelle ère correspond à une industrialisation plus importante du long métrage d’animation. Si son économie demeure fragile, on sent qu’un regard plus mature des professionnels de la profession se pose sur ces œuvres singulières, dont les secrets de fabrication suscitent toujours l’admiration.

    Il a fallu déployer beaucoup d’énergie et une inusable conviction pour sortir indemnes de la forêt de préjugés qui pesaient – et sous certains crânes pèsent encore – sur le cinéma d’animation (qui vont du « c’est pour les enfants » au « c’est pas du vrai cinéma »). Les grands festivals traditionnels sont désormais à l’affût des perles rares, tel le Festival de Cannes dont la dernière édition a fait la part belle à ces travaux de longue haleine, et dans des styles très différents. Ce qui démontre, une fois de plus, la vitalité de la création française.

    La Fameuse Invasion des ours en Sicile de Lorenzo Mattotti (que nous avons présenté en avant‑première en clôture de notre festival Bédérama) et Les Hirondelles de Kaboul (dont le Carrefour du cinéma d’animation avait proposé le work in progress en 2017) ont eu les honneurs de l’Officielle, tandis que la Semaine de la critique, qui a longtemps œuvré pour le cinéma d’animation à travers sa sélection de courts métrages, voyait couronné de son Grand Prix J’ai perdu mon corps de Jérémy Clapin (dont le court Skhizein avait été sélectionné en 2008). Une telle reconnaissance, c’est tout le mal que l’on souhaite à Gitanjali Rao, l’une de nos invité·e·s d’honneur, dont le premier long métrage, Bombay Rose, voit enfin le jour, après tant d’années de travail.

    On l’oublie parfois : l’animation est d’abord un art de la patience.

    On a tout de même l’impression, et c’est de bonne guerre, que certains découvrent le fil à couper le beurre, s’entichant soudain d’un cinéma qu’ils regardaient autrefois comme un divertissement d’ilotes. Parmi d’autres acteurs de terrain, le Carrefour du cinéma d’animation a depuis 17 ans œuvré pour la reconnaissance de ces artistes et de leur travail. N’ayons pas peur des mots ni de la fausse modestie. C’est un festival d’une incomparable richesse, et qui couvre l’ensemble du spectre de l’image par image : depuis les scénarios en quête de producteurs jusqu’aux avant‑premières de longs métrages, en passant par les courts d’écoles, les work in progress, le légendaire Cadavre exquis animé, les master class et les classes en vadrouille, bref, quatre jours où toutes les tendances se croisent et se conjuguent pour poursuivre, bille en tête, ce combat de défricheur.

    Car le Carrefour du cinéma d’animation, face au marché qui se durcit et aux récupérateurs de cadavres, se voit condamné à être ce qu’il a toujours été : un rendez‑vous capital et, comme tous les carrefours, incontournable.

    Fabien Gaffez
    directeur des programmes  du Forum des images