Mercredi 20 mai 2009 Ă  16h30

Partie de campagne

Un tournage Ă  la campagne

de Alain Fleischer

Documentaire | France | VOF | 1994 | 87 min | 3/4 BVU

Un documentaire Ă©tabli Ă  l’initiative de la CinĂ©mathĂšque française par Alain Fleischer d’aprĂšs les rushes non utili­sĂ©s du film de Jean Renoir, Une partie de campagne. Ce montage permet de mieux comprendre la personnalitĂ© des acteurs principaux du film, ainsi que les caractĂ©ris­tiques des personnages qu’ils incarnent. Un Ă©clairage sur Jean Renoir, maĂźtre de la direction d’acteur. 

On va vĂ©rifier, avec Un tournage Ă  la campagne, que le film achevĂ© commence Ă  l’arrivĂ©e Ă  la campagne, et non par le voyage depuis Paris, dĂ©but de la nouvelle de Maupassant. Des plans tournĂ©s qui respectaient la nouvelle de l’écrivain sont ainsi abandonnĂ©s, certains un peu plats, la charette, l’homme sur le vĂ©locipĂšde, les enfants avec les animaux sauvages. (...) 
Le gĂ©nie de Renoir est de construire des plans oĂč les lignes ne sont jamais frontales – tout un jeu d’obliques qui ne figent jamais, serpentines ou sinusoĂŻdales – et de faire que jamais un cadre ne soit fini, qui conserve une part d’inachevĂ©, une capacitĂ© de surgissement, d’entrĂ©es et de sorties par la camĂ©ra, le fond, la droite la gauche. Tout fait surprise, mĂȘme un goulot de bouteille qui surgit au premier plan, Ă  l’occasion d’un contrechamp. Le cadre sert non pas Ă  piĂ©ger le monde, mais Ă  le capturer en flagrant dĂ©lit de surprise. C’est le « comme si » de Renoir, comme si la camĂ©ra n’était pas lĂ , comme s’il n’y avait pas de travail, en quoi consiste prĂ©cisé­ment tout son travail. Les acteurs y trouvent leur libertĂ©, Ă  travers le filmage d’une espĂšce de vibration ou, pour utiliser une expression de Renoir, « d’air du temps », sensation qu’il est le seul cinĂ©aste Ă  procurer. Attentif dans la direction d’acteurs, il ne laisse pas passer une seule faute, mais ce qui lui importe, c’est d’obtenir ce ton faux d’artifice théùtral qui, mĂȘlĂ© Ă  un dialogue direct, sonne comme la vĂ©ritĂ©. S’il est vrai qu’on ne filme qu’une idĂ©e et plus gĂ©nĂ©ralement la pensĂ©e, Renoir fonde son cinĂ©ma sur la formule shakes­pearienne. Nous sommes dans le monde comme s’il Ă©tait une scĂšne, en train d’y jouer un rĂŽle qui est quelquefois, mais rarement, notre rĂŽle. Improvisation apparente, spon­tanĂ©itĂ© apparente, vĂ©ritĂ© apparente : telle est la vie, oĂč toute vĂ©ritĂ© est vraie Ă  un instant, et mensongĂšre Ă  l’autre. 
–Jean Douchet (catalogue Entrevues Belfort, 1996) 

 

A documentary by Alain Fleischer, at the initiative of the CinĂ©mathĂšque française, is compiled from the out-takes of Jean Renoir’s film A Day in the Country. This editing gives us a greater understanding of the personalities of the film’s main actors, and the traits of the characters they play. This document gives us a wonderful insight into Jean Renoir, a master of directing actors. 

With Un tournage Ă  la campagne, we discover that the finished film starts with the arrival in the countryside and not with the journey from Paris, which begins Maupassant’s short story. The filmed shots that followed the author’s story were abandoned, some a little dull, the cart, the man on a velocipede, the children with wild animals
 
The genius of de Renoir is to construct shots in which the lines are never straight-on – a whole interplay of meande­ring or sinusoidal obliques that are never fixed – and to ensure that the frame is never complete, that it keeps a unfi­nished part, a capacity for sudden appearances, entrances, exits via the bottom edge of the frame, the background, from the right or left. Everything surprises us, even the neck of the bottle that appears in the foreground in a shot/ reverse shot. The frame does not serve to trap the world but to catch its surprises red-handed. It is Renoir’s “as if”, as if the camera were not there, as if there were no work – which is exactly what all his work involves. The actors find their freedom there, through the filming of a kind of vibration or, to use Renoir’s words, “the spirit of the times”, a feeling that he is the only filmmaker to have seized. Mindful of how actors are directed, he allows no errors. What matters to him is to achieve this false tone of theatrical contrivance that, when mixed with live dialogue recording, sounds like truth. While it is true that what is filmed is only an idea and more generally thought, Renoir bases his cinema on the Shakespearian formula. We are in the world as if on a stage, acting a role that is sometimes, but rarely, our own. Apparent improvisation, apparent spontaneity, apparent truth: such is life, where all truth is true at one moment and false at another. 
–Jean Douchet (catalogue Entrevues Belfort, 1996) 

Partie de campagne

de Jean Renoir

Avec | Jane Marken, Sylvia Bataille | Fiction | 1946 | 40 min | Noir et blanc | 35mm optique

ÉtĂ© 1860, un boutiquier parisien et sa famille passent un dimanche au bord de l’eau. Écrite en 1936, cette adaptation de Maupassant reflĂšte l’époque radieuse du Front populaire. Mais la beautĂ© de la nature et la sensualitĂ© des images, qui doivent beaucoup aux impressionnistes, se teintent de la noirceur des temps Ă  venir.