Jeanne Dielman, 23 quai du Commerce, 1080 Bruxelles

Veuve ordonnée et mère d’un adolescent, Jeanne arrondit ses fins de mois en se prostituant à domicile, calant ses rendez-vous entre ses tâches ménagères, selon un emploi du temps immuable, répété jour après jour. Un matin, le réveil sonne une heure plus tôt et dérègle cette mécanique sans vie, libérant d’un coup toute l’angoisse refoulée…

« C'est un film sur l'espace et le temps et sur la façon d'organiser sa vie pour n'avoir aucun temps libre, pour ne pas se laisser submerger par l'angoisse et l'obsession de la mort. » Chantal Akerman a 25 ans quand elle conçoit ce qui reste son film le plus célèbre. Entre expérimentation formelle et regard sur la quotidienneté, Jeanne Dielman suit trois jours durant le parcours d’une femme dont les gestes frôlent l’obsession. La raréfaction des lieux et personnages ou encore le hors-champ permettent de créer un monde en soi qui, une fois déréglé, fait prendre conscience à son personnage de la cruauté du rôle que la société lui a imposé. Delphine Seyrig, féministe, interprète chez Resnais, Truffaut ou encore Buñuel, demande à jouer le rôle après que Chantal Akerman lui ai fait lire une première ébauche par amitié. Des années plus tard, des cinéastes du monde entier continuent d’évoquer le film comme une influence majeure de leur travail.