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    The Spirit
    The Spirit © Collection Christophel

    Noir Lumière

    Du 1er avril au 23 mai 2010

    Plus qu’une couleur, le noir est symbole(s). Il a été ressenti différemment selon les époques. Récupéré par tout un chacun, le noir n’est qu’interprétations. Ce programme propose d’en parcourir les principales – élégance et érotisme ; autorité et austérité ; mal, mort et terreur ; rébellion ; crasse, ... De la petite robe noire de Cléo à l’ombre du corbeau, pleine lumière sur le Noir... 

    Les usages de la couleur noire par les cinéastes sont multiples, de la   tenue reflétant la noirceur d’âme à la mise en valeur d’un décor.   Certains courants esthétiques du cinéma ont été particulièrement   favorables au noir : l’expressionnisme allemand qui fait s’affronter   violemment ombre et lumière ; le réalisme poétique, empreint d’un   pessimisme couleur de suie ; le film noir et ses bas-fonds, ses ruelles   sombres, ses femmes fatales ; le cinéma classique hollywoodien qui   utilise le noir comme écrin pour les jeux de lumière sur les visages  des  stars ; le cinéma fantastique, notamment celui des années 30, qui  use  et abuse des châteaux sombres et des scènes nocturnes… Derrière  tous ces  genres, toutes ces esthétiques, il y a la puissance symbolique  d’une  couleur qui n’en est pas tout à fait une, d’une « non-couleur » :  le  noir. 

     

    Le noir, emblème du luxe et de l’élégance

    S’il porte le plus souvent une connotation négative, le noir est aussi une couleur valorisée. Et le programme commencera par cette nuance de noir. Celui du chic évidemment. 
    Source d’inspiration de nombreux créateurs de la mode (Coco Chanel, Hubert de Givenchy, Chantal Thomass…), le noir est le symbole de l’élégance, du raffinement, de la sobriété. Films en « robe noire et smoking » enchantent le début du programme (de Catherine Deneuve en manteau YSL dans La sirène du Mississipi à Sylvie Vartan en robe lamée noire dans L’ange noir).
    Mais il y a également un noir plus respectable, celui de la tempérance, de l'humilité, de l'austérité, celui qui fut porté par les moines et imposé par la Réforme. Il s'est transformé en noir de l'autorité, celui des juges (quel meilleur exemple qu’Orson Welles en avocat imposant dans Le procès) et des ecclésiastiques (du Journal d’un curé de campagne à Sanglantes confessions). 

     

    Les destins contradictoires du noir

    Si les grands couturiers s’en sont emparés, les rebelles (motards, blousons noirs et rockeurs…) l’ont adoptée pour marquer leur rejet agressif de la société. 
    La moto apparaît au cinéma comme élément principal à partir des années  50/60, dans des épopées de la violence et de la vitesse. Elle symbolise la liberté et la contestation de l'ordre établi et porte l'idée de mort (Ghost rider). Toute une panoplie renforce l'aspect mythique de l'engin comme les vêtements de cuir noir, les bottes, etc. – Brando sur son engin dans L’Equipée sauvage en est le meilleur exemple.
    Celui qu’on appelle le "blouson noir" au début des années 1960 est un jeune voyou qui porte ce type de vêtement en cuir noir brillant, sur fond d'urbanisation. Ses "idoles" sont James Dean, Marlon Brando, Elvis Presley, Dick Rivers ou Johnny Hallyday. C’est John Travolta, cheveux gominés, blouson noir et jean moulant dans Grease ou de Niro en petite frappe en cuir dans Mean Streets…
    Le rock, lui, n'est plus seulement un mouvement musical depuis le milieu des années 1950. Le film Graine de violence qui présente en générique le fameux Rock Around the Clock de Bill Haley pose d'ailleurs d'emblée les bases sociales du mouvement : la rébellion face à l'ordre établi. Musique ! Punk rock ou New Wave (Mona et moi, L’affaire des divisions Morituri) ?
    Mais si le noir évoque la rébellion et le désordre avec ses cohortes de pirates et d’anarchistes (le drapeau noir était autrefois celui des pirates et il signifiait la mort ; il a été repris par les anarchistes au XIXe siècle), il est également l’incarnation du justicier solitaire (Zorro ou Batman) qui met au défi l’ordre établi pour défendre la cause des plus faibles et lutter contre les inégalités.  

     

    Le noir, incarnation de tous les maux

    « La couleur noire… entretient un rapport privilégié avec l’obscurité, l’ombre, les ténèbres, et la symbolique qui y est rattachée a toujours hanté notre imaginaire,… » . Ainsi le noir convoque les forces du mal, inspire la peur, voire l’angoisse. 
    Spontanément, le noir évoque les peurs enfantines : le film d’animation Peur(s) du noir nous y mène d'un trait noir, alors que le cinéma espagnol ne cesse de mettre en scène des enfants tapis dans l’obscurité d’une maison sinistre (Les autres, Darkness).
    Cette couleur inquiète : elle évoque les enfers, le diable et la sorcellerie. Souvent représenté comme un homme grand avec une cape noire - sa cape lui servant à cacher sa queue, ses bottes à dissimuler des sabots et ses gants de cuir à enfermer ses griffes pointues, le diable, symbole des ténèbres et du mal, sera bien présent sur nos écrans, de Faust au Prince des ténèbres. 
    .C’est aussi la couleur noire qu’arbore la Mort lorsqu’elle vient faire sa moisson d’âmes (Le septième sceau, un des portraits les plus marquants et les plus symboliques de la mort au cinéma) ; elle encore qui est portée lors d’un deuil – c’est Mrs Danvers dans Rebecca. Avec leur robe sombre, Le corbeau et le Chat noir sont supposés présager l’arrivée imminente d’un malheur ou d’un danger. Elle encore que porte le méchant qui représente le mal (La chasse du comte Zaroff).
    Le cinéma gothique (Underworld, Les Prédateurs) joue sur cette esthétique sombre et macabre, en mettant en scène vampires et autres monstres...
    Mais le noir est également associé au monde du labeur, de la souffrance, de la misère. Mineurs, encore appelés « gueules noires » (La tragédie de la mine), cheminots des locomotives à vapeur (La bête humaine), sont les figures marquantes de l’ère industrielle. Le cycle leur rend hommage à travers cinq films emblématiques. 

     

    Peaux noires, fiertés noires

    Comme le relève Annie Mollard-Desfour : « La couleur [noire] classe les choses mais aussi les êtres. Blanc, jaune, noir… Noir comme la couleur de la peau foncée des personnes appartenant à la race mélano-africaine. Homme de couleur. Noir, mais encore black, blackos, kebla, nègre, renoi. Race noire souvent sujette à l’oppression et au racisme. Esclaves noirs traités comme de la marchandise et appelés bois d’ébène. »  
    Le cycle aborde cette question à travers le mouvement de fierté noire (Black Pride), appelé « Black is beautiful », qui incitait les Afro-américains à assumer fièrement leur identité spécifique, leurs racines culturelles et leur couleur de peau à partir de la fin des années 1960 (une fois les premières victoires pour l'obtention des droits civiques acquises). Deux films cultes de la blaxploitation seront projetés : Sweet Sweetback’s Baadasssss Song de Melvin Van Peebles et Les nuits rouges de Harlem (Shaft) de Gordon Parks.
    Et surtout, le Forum des images donne la parole au Festival du Film “France Noire—Black France”, qui fait suite à un colloque à l’Institut des Chercheurs de l’Université de Columbia à Reid Hall à Paris : films centrés sur les expériences historiques et contemporaines des “Noirs” en France. Le Festival montrera des œuvres cinématographiques en français et en anglais consacrées au thème " La Présence Noire en France/The Black Presence in France.”