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    Sandrine Kiberlain

    La Master class de Sandrine Kiberlain

    animée par Pascal Mérigeau, critique à L'Obs

    Enfant, elle n’arrêtait pas de faire le clown : « Je ne sais pas si j’étais drôle, mais enfin je faisais rire tout le monde. » Aujourd’hui, elle sait. Et aussi que pour jouer la comédie, il faut n’avoir pas le souci de sa propre image, il convient de s’abandonner. Tout cela, que peut-être elle savait quand elle était enfant, Sandrine Kiberlain l’a réappris, elle qui lorsqu’elle décida de devenir actrice, rêvait plutôt de faire pleurer, pareille en cela à toutes les aspirantes comédiennes, qui songent d’abord à Ingrid Bergman, à Romy Schneider.

    Alors, ce qu’elle-même désigne comme son naturel est revenu au galop, sans pourtant fermer la porte ouvrant sur les personnages graves. L’institutrice de Mademoiselle Chambon, le beau film de Stéphane Brizé, par exemple, ou encore son incarnation, brune comme il se devait, en chignon, un peu masculine, de Simone de Beauvoir dans Violette. Depuis quelques années, c’est ainsi, elle rayonne dans tous les emplois. Dans 9 mois ferme, elle était irrésistible en juge obsédée par le travail, sans aucun souvenir ni des circonstances ni de celui auquel elle doit de se découvrir enceinte : Albert Dupontel fut tout près de renoncer au film, au motif que pour jouer ce personnage colérique il cherchait une actrice petite et brune, soit précisément à l’opposé de Sandrine Kiberlain, blonde, 174 centimètres sous la toise. C’était en 2013 et cette même année lui apporta le bonheur qu’elle attendait sans oser forcément y croire, cette proposition d’Alain Resnais qu’elle espérait et qui lui valut de participer à l’aventure Aimer, boire et chanter, l’ultime film du maître.

    Au gré des films, plus de cinquante désormais, et des expériences diverses, télévision, théâtre, chanson, elle a acquis une liberté de jeu qui lui rend tout possible, et trouvé la force de ceux qui savent n’avoir rien à perdre, rien à gagner.  Enfant, quand pour un moment elle arrêtait de faire le clown, elle observait les autres, exercice qui lui offre aujourd’hui de « trouver » ses personnages sans qu’il soit nécessaire au metteur en scène lui en dépeindre les contours.  Et elle qui ne va jamais au cinéma que seule se délecte sur les tournages de faire partie du groupe, toujours sur le plateau, jamais dans sa loge, parlant avec les uns et avec les autres, différente absolument de ce qu’elle est dans la vie. Comme une recréation dans l’existence, un parfum d’enfance.
    Pascal Mérigeau