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    Présentation du cycle "La jeune fille"

    L’HOMME - Ô image de la Beauté éternelle, tu n’es pas à moi !
    LA JEUNE FILLE - Je ne suis pas une image !
    "L’Annonce faite à Marie" d’Alain Cuny*


    La jeune fille et les images, la jeune fille dans les images, voire la jeune fille comme une image, c’est une longue histoire. Celle-ci est si puissamment ancrée dans nos esprits, dans nos rétines, que bon nombre de représentations, de la sulfureuse lolita (Lolita de Stanley Kubrick) à la pucelle blanche colombe (Le Procès de Jeanne d’Arc de Robert Bresson), nous paraissent tout à fait naturelles là où il n’y a que des constructions, des conventions, des codes. La jeune fille à l’écran charrie de multiples problématiques et questionne nos rapports complexes à l’âge, au genre, aux dynamiques entre les générations et les sexes.

    Selon l’anthropologue Françoise Héritier, il n’existe pas de société humaine sans stéréotype de genre. Chaque époque, chaque culture assignent des valeurs, des attributs au féminin et au masculin. Certaines répartitions ont la vie dure. « Les hommes rêvent des femmes, les femmes rêvent que l’on rêve d’elles. Les hommes regardent les femmes, les femmes s’observent en train d’être regardées », note John Berger**. Les dispositifs de regard reconduisent encore aujourd’hui ce partage très répandu : les hommes sont les créateurs et les femmes les éternelles muses. Et lorsque les femmes passent derrière la caméra, elles filment à leur tour, le plus souvent, des corps féminins : À ma soeur (Catherine Breillat), Bande de filles (Céline Sciamma).

    La jeune fille est un laboratoire d’expérimentation, d’apprentissage, où se construit le féminin. « Dans masculin, il y a masque et cul, dans féminin, il n’y a rien », nous apprend Masculin, féminin du malicieux Jean-Luc Godard. Que faut-il faire alors pour devenir Une vraie jeune fille (Catherine Breillat) ? À chacune de composer avec les normes, les attentes, les discours sur le genre, d’en jouer, de les déjouer. Comme dans À nos amours (Maurice Pialat) ou Lolita malgré moi (Mark Waters), c’est dans ces espaces de liberté ludiques que se déploient la belle vitalité, l’insolente sensualité, l’humour et la vaillance des jeunes filles.


    * Adapté de Paul Claudel, "L’Annonce faite à Marie"
    ** Ways of Seeing, série d’émissions diffusée sur la BBC, puis éditée chez Penguin Books, 1972